Vendredi, 21h00. Il avait besoin de faire un break. Les humeurs de sa demi-sœur, les sourires hypocrites de son père, les rendez-vous de sa belle-mère, les appels incessants de Matt pour qu'ils répètent un soir de plus, les groupies qui le harcelaient à chacune de ses sorties, il avait besoin de faire un break. Il retrouva l'adresse d'une maison d'hôtes en plein montagne, leur téléphona et réserva un chalet pour le week-end, pour deux.




Il sortit son sac de sport de son placard, et y rangea précautionneusement deux tee-shirts, un jean, deux boxers, un pantalon de jogging, deux paires de chaussettes, sa trousse de toilette elle même remplie d'une brosse à dent, d'un tube de dentifrice, d'un gel douche, un rasoir, un gel à raser, un déodorant, un peigne, son parfum. Et rien d'autre. Comme il lui avait précisé, pas d'ordinateur, pas de téléphone, rien. Juste eux deux, tranquille, dans un chalet, face aux neiges éternelles, sans rien pour les perturber. Il appréciait le calme, la solitude. Mais la compagnie de Merry était encore plus précieuse. Avec elle, pas besoin de se prendre la tête, pas besoin de jauger chaque mot avant de les prononcer, pas besoin d'être le ténébreux Gabriel, froid et distant... Pourtant, il restait froid avec elle. Mais elle s'en fichait, elle lui avait dit. Ils étaient naturels l'un avec l'autre, se disaient tout ce qu'il y avait à dire, sans passer par quatre chemins. Il n'y avait rien d'ambigüe, c'était plaisant. Ils étaient amis, et couchaient ensemble, point. Ils étaient d'accord sur le principe de la relation entre les hommes et les femmes. L'amour ne pouvait exister, pour l'un comme pour l'autre.

Il accrocha un post-it sur sa porte. Je pars pour le week-end, mon portable sera éteint. Nul dans cette maison n'avait besoin d'en savoir plus, et ses parents s'en ficheraient totalement. Seule Luccia allait être frustrée et allait sûrement l'appeler une ou deux fois. Mais au final elle en profiterait pour se faire des sous en faisant visiter sa chambre, sûrement. Il sortit dans la cour, monta en voiture, et démarra. Direction, l'appartement de Merry.

Vendredi, 21h00. Réfléchir. Que faire à manger ce soir ? Elle n'avait pas faim. Elle était rentrée il y a seulement une demi heure du boulot, et n'avait pu que prendre un bon bain. Elle se baladait en sous-vêtements dans sa cuisine, cherchant de quoi manger. Rondoudoudoudou, Rondoudou, Rondoudou ♪ Un sms. Elle sortit une boite de thon de son placard, la posa sur la table et alla chercher son téléphone. Gabriel. Bien, elle n'aurait pas à faire la cuisine !




Elle retourna dans la salle de bain pour enfiler des collants noirs, un short en jean, et un Marcel noir. Elle attrapa ensuite le premier sac qui lui tomba sous la main, et y fourra un short noir, une paire de collants noirs, ainsi qu'une paire de collants transparents, une paire de ballerines noires, un tee-shirt noir et un dos nu blanc, deux ensembles de sous-vêtements, et sa trousse de toilette avec à l'intérieur sa brosse à dents, son dentifrice, son gel douche, son shampoing, deux pastilles de bain au cas où, sa brosse à cheveux, son déodorant et son parfum. Elle pensait ne rien avoir oublié... Elle envoya un message à Ethan pour le prévenir qu'elle ne pourrait répondre du week-end, sans autre explication, et elle éteint son téléphone. Si elle lui donnait la raison, il lui en voudrait. Ils s'étaient déjà disputés à ce sujet... Et puis il pourrait être jaloux, il le lui avait avoué la veille. Elle appréciait énormément Ethan... Mais avec Gabriel, c'était différent. Et ça, Ethan ne pourrait le comprendre. Gabriel la comprenait peut-être plus que son tendre meilleur ami. Du moins, il avait le même point de vue qu'elle au sujet de l'amour. Point de vue que ne partageait pas tout à fait son rockeur. L'ancien chanteur, pas le bassiste. Et ce week-end, elle avait besoin d'oublier les évènements de la veille. Gabriel était parfait pour ça...

Elle entendit un bruit de moteur en bas. Elle s'attacha les cheveux en vitesse, enfila ses bottines, sa veste de cuir, et prit son sac. Elle ferma la porte de son appartement à clefs, et descendit deux par deux les marches de son escalier. Elle arriva devant la berline noire, et ouvrit la porte du côté passager.

« Bonsoir, homme mystérieux. Puis-je monter ? »

Sans attendre la réponse du chauffeur, elle grimpa et balança son sac à l'arrière. Une fois installée, elle ferma la porte et boucla sa ceinture.

« Je suis impatiente de découvrir l'endroit où tu m'emmènes, Gabriel. »

Vendredi, 22h00. Elle prononça son nom avec tant de grâce. Il avait envie de lui sauter dessus pour assouvir ses pulsions charnelles. Son parfum l'enivrait. Rose, Framboise, Jasmin, Cassis... Il arrivait à déceler ces quatre ingrédients. Mais ceux là ne suffisaient pas à enivrer un homme. Non, il y avait bien d'autres choses dans cette odeur... Composants du parfum, mais aussi l'odeur de Meredith. Il y avait des femmes, comme elle, pour qui il aurait été capable de devenir Jean-Baptiste Grenouille. Leur voler leur odeur... C'était dangereux d'avoir de telles pensées. Surtout quand on savait que ce cher homme avait finit dépecé et dévoré par les passants. Il sortit une cigarette qu'il alluma tout en ouvrant sa fenêtre. Il savait que Meredith ne fumait pas.

« Un restaurant chic te plairait ou tu préfères qu'on s'arrête sur une station d'autoroute ? »

Il ralluma le moteur. Sa berline démarra au quart de tour et s'engouffra dans la nuit. Il connaissait sa réponse avant même qu'elle la prononce. Il la connaissait de mieux en mieux. Elle balançait doucement la tête à coté de lui.

« Un restaurant chic m'aurait bien plu mais... Une station ira bien plus vite. Tu m'inviteras au restaurant un autre jour ! »

Il se dirigea donc vers l'entrée de l'autoroute. Lui aussi avait envie d'arriver le plus vite possible. Dans un silence qui aurait pu paraitre pesant, mais qui entre eux l'était rarement, ils roulaient, dans la pénombre, avec pour seule lumière les phares de la voiture. Il jeta son mégot par la fenêtre et remonta sa vitre. Il arrivèrent rapidement dans une petite station quasiment déserte.

« Je vais acheter des sandwichs, on arrive plus rapidement. Attend moi là. »

Sur ces mots, il descendit de la voiture et ferma Meredith à l'intérieur. Il ne connaissait même pas ses goûts. Mais il s'en fichait. Il n'avait pas envie de réfléchir, et agissait par impulsions. Avec n'importe quelle autre fille, il aurait agit différemment, mais elle n'était pas n'importe quelle autre fille, et il savait qu'elle ne lui en voudrait pas. Il se dépêcha de payer deux sandwichs, un paquet de chips et une boite de cookies à une vendeuse désagréable, et revint. Elle l'attendait sans broncher. Elle était belle, Merry.