Aujourd’hui après les cours on avait bien fait à Luccia une foule de propositions intéressantes. Faire du shopping, se moquer des geeks du club d’informatique, éplucher la presse à scandales, prendre un verre dans le dernier bar à la mode. Et pourtant, elles les avaient toutes refusées. Et pourquoi ce soudain désintérêt de toutes les choses qui d’habitudes lui plaisait tant ? La raison tenait en quelques lettres : Dear Alix. Elle n’avait cessé de penser à lui durant chaque heure de cours depuis ce matin. Oui, aujourd’hui, elle voulait une compagnie élégante à la conversation intelligente et raffinée. Pas comme tous ses « amis » du lycée et leurs jeux parfois trop puérils. C’est donc à la bibliothèque, cachée entre deux grosses encyclopédies d’histoire, que Luccia fit semblant de travailler avec son téléphone portable sur les genoux, connecté sur love-communication. Il n’y avait plus qu’a prié pour qu’il soit lui aussi présent.

Azraël se connecte.

Azraël dit : Mon royaume pour un divertissement !

Elle attendu quelques secondes, les yeux fixé sur l’écran. Pesante solitude. Il fallait se faire une raison, il ne viendrait pas. Mais au moment de refermer son portable, elle vit apparaitre in extremis, le fameux personnage tant attendu.

Azraël dit : Vous ici, très cher ? Je ne nous vous attendais pas: je suis surprise.

Un grand sourire se dessina sur les lèvres de Luccia. Il fallait parfois se faire distante pour garder la tête froide.

Tandis que ses longs doigts fins tapaient en cadence sur le clavier de son téléphone portable, Luccia sentit un certain enthousiasme monter en elle. Comme un enfant heureux, auquel on aurait promis un second tour de manège. Mais aujourd’hui le carrousel avait été remplacé par un prince charmant en tout point parfait aux yeux de l’adolescente. Elle aimait ses bonnes manières et son orthographe impeccable.

Azraël dit : Eh bien, voilà une très bonne remarque. Je suppose que personne ne peut aussi bien me divertir que vous. En tout cas je puis vous promettre que je ne suis pas du genre à feindre la surprise.

Un petit mensonge de temps en temps, ne faisait de mal à personne. Et puis, après tout, la plus grande menteuse ici, ce n’était sûrement pas elle.

Azraël dit : Il y a encore quelques instants, j’étais las de cette journée. J’espérais qu’elle allait finir bien vite. Mais maintenant que vous êtes ici, c’est différent. Je me porte désormais comme un charme.

Azraël dit : Mais assez parlé de moi : quel bon vent vous amène en cette fin d’après-midi ?

Alors qu’elle venait juste d’appuyer sur la touche entrée, une jeune fille à lunettes passa devant elle avec une mine réprobatrice. Bien entendu Luccia ne manqua pas de lui répondre en la foudroyant du regard ce qui fit fuir rapidement le rat de bibliothèque derrière le premier rayonnage de bouquins venu. Non mais.

La jeune demoiselle, à présent seule dans le vieux recoin de la bibliothèque écarquilla grand les yeux, lorsqu’elle vit le nom d’une de ses stylistes préférées apparaitre sur son écran. Elle avait relu la phrase plusieurs, pensant que son imagination (accumulée à la fatigue) lui jouait de vilains tours. Mais non elle avait beau relire, le nom était bel et bien écrit en toute lettre. Un homme de goût. Si elle avait été seule dans sa chambre, elle aurait sans doute laissé un échapper un grand soupire d’enthousiasme béat.

Azraël dit : Eh bien mon ami, je ne peux, qu’appuyer ce choix judicieux. Vous entendre parler d’une marque de haute-couture que j’affectionne autant me met, je dois dire, en joie après cette rude journée.

Azraël dit : Après avoir passé la journée près d’ignorants, ces paroles sont pour moi comme une douce bise rafraichissante. Sans mentir !

Dans son esprit se dessinait un jeune homme de plus en plus beau, avec beaucoup de goût et de culture. Il y a bien longtemps que Luccia aurait put aller sur son profil pour regarder les photos de ce Dear Alix pour se rendre compte de la réalité, mais en fait cela ne l’intéressait pas. L’imagination était bien mieux que toutes les photos du monde.

Azraël dit : Votre goût pour les belles choses m’impressionne. Dites-moi la vérité, y a-t-il quelque chose dont vous ne soyez pas expert ? Je vais commencer à croire que vous n’existez pas réellement !

Bien sûr, il n’y avait aucune raison à cela. L’adolescente croyait dur comme fer à l’existence de ce prince charmant en tout point parfait.