Bon. Finalement, Savannah avait du lâcher son portable adoré pour se remettre sérieusement au travail. Le boss était en réunion, donc pas de souci de ce côté là, mais disons que ses projets de personnages n'allaient pas avancer tout seul. Actuellement, elle devait terminer le design d'une nouvelle classe d'elfes vivant dans des montagnes gelées, ainsi que les nains, dont le design était à refaire, selon les souhaits du patron lui-même. Parmi les character designer employés ici, elle était la plus ancienne et surement la plus reconnue parmi leurs fans. On pouvait dire que c'était un peu elle qui commandait le tout, également. Et ça, ça lui plaisait. Elle aimait pouvoir imposer ses idées, après tout.

Enfin bon, pour en revenir à cette fin de journée, la blonde travaillait toujours. Après tout, ce n'était pas encore l'heure de partir, et elle était toujours la dernière. Sur son bureau, le fameux dessin qu'elle avait fait pour Ambre. Ce n'était pas n'importe quoi. Une magnifique robe rouge qui lui irait surement à ravir. Ce n'était qu'un dessin, quelque peu détaillé qui plus est, puisque comprenant le tissu, la couleur, les coutures à faire, etc. Mais elle comptait la réaliser si elle plaisait à son amie. Oui, mademoiselle Delacroix était une demoiselle quelque peu étrange et décalé. Mais pour sa meilleure amie comptait énormément pour elle. Alors une cadeau de temps en temps n'était pas grand chose au final.

La tenue du jour était composée d'un jean moulant délavé, une borderie de Mario se trouvant d'ailleurs sur la poche arrière gauche. Pour le haut, un simple t-shirt violet, avec en motif une princesse aux oreilles pointues venant d'un célèbre jeu-vidéo. Normal, quoi. Sinon, à côté de sa chaise, une paire de talons hauts, comme toujours, assortie à son t-shirt. Elle avait toujours eu l'habitude d'enlever ses chaussures pendant qu'elle travaillait, et se promenait parfois à pieds nus. Autant dire que l'ambiance ici était assez cool et joviale, il n'y avait pas à dire.

Regardant de temps en temps sa montre, se demandant quand est-ce que son amie allait arriver, elle soupirait, ajustant quelques détails, changeant des couleurs. Elle faisait toujours plusieurs modèles qu'elle présentait ensuite à son patron. C'était souvent lui qui faisait les choix définitifs, à vrai dire. Ça ne la dérangeait que peu, sachant qu’elle travaillait plutôt vite. Quand elle ne se laissait pas déconcentrer par l'une ou l'autre chose qui la dérangeait. Comme les crises de nerfs de Derrick, un des programmeurs principaux. Ça la faisait toujours rire, et elle adorait le taquiner. Et puis bon. Il était sympathique, le patron. Toujours bien habillé et tout. Il avait de l'allure, et un charmant fessier, elle devait bien l'avouer. Pourtant, c'était rare qu'elle regarde trop les hommes de cette façon. Savannah était ce qu'on pouvait appeler une catastrophe niveau histoires de coeur. Maladroite et du genre à gaffer tout le temps. En plus de ça, elle était quelque peu timide et énervait rapidement les gens, de par sa passion et sa façon d'être.

Enfin voilà. Et Ambre commençait à tarder. Elle venait souvent ici, et les gens la connaissaient bien. Ils ne se posaient même plus de question quand elle débarquait dans le bureau et sautait sur la blonde qui s'empressait de dire une connerie, évidemment. « J'ai faim. »

Quoi de plus tentant que de passer une après-midi entière avec un môme de cinq ans dont la nouvelle passion est les consoles de jeux ? Ambre n’y connait rien à tout ça. Elle connait les sims mais elle ne doit pas prononcer ce mot devant sa geek de meilleure amie au risque de se faire flageller. Alors elle a abandonné l’idée d’un jour comprendre l’engouement de Sav’ pour ce genre de jeu en 2D. Elle se concentre à faire tourner son journal et c’est déjà un grand pas. Pour ce qui est de Steve, elle l’adore tellement qu’elle le gâte. Elle n’aura pas d’enfant. Pas parce qu’elle ne le veut pas mais le fait de savoir que l’ambre grise est quelque part en elle lui fait peur. Elle ne veut pas transmettre ca à son fils ou sa fille. Alors faute d’avoir une famille, elle se rabat sur celle de sa meilleure amie. Bien sûr, elle sait quand se retirer. Elle n’est pas si envahissante que ça quand même. Enfin si, mais seulement avec les personnes qu’elle n’aime pas réellement.

Après avoir kidnappé son filleul à l’école, l’avoir plus que correctement nourrit et l’avoir laissé jouer alors qu’il aurait dû faire sa sieste (si ce n’est pas une marraine parfaite ca…) Ambre pris le petit garçon et le ramena dans son école ou la maitresse s’empressa de lui faire la morale. Après une dizaine de bâillements forcés de la part de la jeune journaliste, la femme, excédée, la laissa enfin partir. Elle s’arrêta chez Merry’s, un magasin de gâteau en plein centre-ville. Il est toujours bondé ! Les pâtisseries sont horriblement chères mais grâce à sa carte de presse, elle bénéficie d’une réduction à cinquante pourcent. En plus de ça, dès qu’elle commande une grande quantité d’un seul produit, il suffit qu’elle dise que c’est pour un article et le patron lui offre la dernière fournée. C’est plutôt agréable ce métier quand on y pense bien.

Lorsqu’elle arriva, ce fut Logan qui l’accueillit. Un jeune homme charmant qui a son service du mardi au vendredi de 14h à 19h. Il est grand, très blond et possède deux magnifiques yeux d’un vert profond. Begin ? Il l’a été lorsqu’il est arrivé en ville. Après tout, il n’y a pas tant de beaux hommes dans cette ville… Alors quand un bel homme débarque, il faut voir ce qu’il y a avoir. Mais il ne s’était rien passer et ne se passerait rien. Elle ne voulait pas, bien trop gentil et innocent pour ça. Elle lui commanda alors la douzaine de muffins de toute couleur et de toute taille, une boite déjà assortie ou se trouvaient tous les meilleurs produits de la boutique, et une dizaine de cookie chocolat-noisette. Elle régla le tout et grimpa dans sa mini rouge pour se rendre au bureau de sa goinfre d’amie.

Arrivée en bas de l’immense immeuble, elle soupira. Ses collègues étaient peut-être un peu sympas mais très collants. M’enfin, c’était certainement le phénomène « geek ». Elle prit les gâteaux et grimpa jusqu’à l’étage de sa meilleure amie. Elle était encore habillée n’importe comment, désespérant. Posant les boites de gâteau sur le bureau, bien encombré, de la blonde, Ambre pesta et la pris dans ses bras.

« Va vraiment falloir refaire ta garde-robe ma chérie, ça va plus du tout. » soupira-t-elle avant d’ôter sa veste de couturiers d’un beige pâle et impeccable.

Elle la plia soigneusement et la déposa sur le dos du fauteuil sur lequel elle s’installait toujours quand elle venait ici.

« Mange, espèce d’estomac sur patte. » sourit-elle en ôtant à son tour sa paire de chaussure à talons.

Elle se faisait un peu attendre, sa chère amie. Et ça franchement, ce n'était pas vraiment dans les cordes de la blonde, la patience. Surtout que son ventre criait famine, quémandait de quoi subsister jusqu'au repas de ce soir. Oui, mademoiselle était un ventre sur pattes, ce n'était pas étonnant. Et puis bon, elle avait envie de voir sa folle adorée, elle lui manquait, alors qu'elles s'étaient vues il n'y a pas si longtemps que ça. Après tout, elle y était grandement attachées, et ce malgré leurs désaccords nombreux et leurs différences, tout aussi nombreuses. Comme quoi, dire que les contraires s'attiraient était peut-être véridique. Dans leur cas du moins.

De plus, Steve adorait sa chère marraine, qui le gâtait bien plus que nécessaire. Au moins, Savannah se déchargeait du fait qu'il allait devenir un gosse pourri-gâté. C'était la faute d'Ambre. Elle le lui refilerait quand il fera sa crise d'adolescence, tiens. Ça lui fera les pieds. Pourtant. Elle ne se voyait pas lui interdire de faire plaisir à son petit poussin. Elle le savait, elle l'adorait, ce petit bonhomme haut comme trois pommes. Tout comme elle savait que jamais sa très chère amie ne fonderait de famille. Ce n'était pas dans ses plans, à cause d'un certain problème. Ça lui faisait mal au coeur, pour tout dire, et sincèrement, elle espérait qu'elle puisse malgré tout avoir une vraie vie. Enfin bon, ce n'était pas gagné.

Et finalement, alors qu'elle s'endormait presque, elle entendit des pas. Redressant vaguement la tête, regardant autour d'elle, un vague sourire éclaira ses lèvres. Rapidement, elle vit sa meilleure amie apparaître. Avec quelque chose de bien intéressant. Oui, ses yeux avaient rapidement repéré la boîte de gâteaux dont elle reconnaissait la provenance. Et comme elle s'y attendait, elle eut droit à un commentaire sur sa tenue. Ce à quoi elle répondit, un sourire narquois aux lèvres : « En attendant, mon jean coûte surement plus cher que ta tenue au complet, chérie. » Après tout. Jean en denim délavé de qualité supérieure, slim et ajusté au millimètre près -et on exagère à peine- et surtout, en pièce unique et originale. Oui, il avait coûté la peau du cul. Sauf que c'était un cadeau, donc bon.

Et puis, elle la regarda longuement, sans rien dire de plus. Un vague sourire aux lèvres. Sa chevelure était attachée en queue de cheval, sa frange masquant son front, quelques mèches dépassant sur les côtés. D'ailleurs, le blond doré de sa crinière mal disciplinée faisait plutôt bon ménage avec le teint mat de sa peau. Et, lorsqu'elle entendit la bénédiction de son amie -elle prenait sa phrase ainsi- , Savannah n'attendit pas plus pour ouvrir une boîte et y piocher une douceur, qu'elle mangea rapidement, avant de lui lancer, tournant un peu sur sa chaise : « Hu. J'croyais au moins que tu ferais l'effort de les préparer toi. Paresseuse. » Elle rit et en prit un autre, avant de la regarder longuement, le sourire amusé, tout comme son regard.

Terminant un troisième gâteau, elle demanda alors, la tête légèrement penchée sur le côté : « Et tu vas bien, depuis nos texto ? » Sans attendre la réponse, la jeune femme se tourna alors sur son siège, frolant le contact douloureux entre son genoux et le meuble, pour attraper le dessin, sur une feuille de grand format, et le tendre à la brune, tout en prenant un air victorieux : « Tadam ! Alors ? Ca te plait ? Hein ? » Elle espérait vraiment que cette robe lui plaise, à vrai dire. Vraiment.

Soupire d’agacement. Pourquoi alors qu’elle était si belle, sa bornée de meilleure amie ne cessait de s’habiller n’importe comment ? Soit, son jean était magnifique. Mais quelle idée stupide le styliste avait en collant cette espèce de petit bonhomme disgracieux sur la poche arrière ?! Ambre rit un peu en voyant la blonde se jeter avec envie sur les muffins et se dit qu’elle n’aimerait pas être à la place de ces mêmes muffins.

« Je vais bien. J’ai relâché ton fils aux griffes de cette vieille sorcière et j’ai vu Logan. Donc tout va biiien. »

Oui, techniquement Savannah sait que Logan plait à Ambre. Elle sait aussi qu’il n’y aura rien entre eux. Et pour finir, elle sait pertinemment qu’elle n’est pas censée être au courant. Oui, Ambre ne lui en a jamais tellement parlé, elle reste assez discrète sur ces aspects de sa vie, même avec sa meilleure amie. Si Ambre à parler de Logan, c’est parce qu’elle sait que Sav’ la connait et qu’elles ont bien délirées dessus quand il est arrivé en ville. Puis, la jeune brune prend la feuille et hausse un sourcil. Elle ne comprendrait jamais l’enthousiasme de sa meilleure amie pour ces tenues rocambolesques. Elle lui aurait fait une simple robe bleu clair parée de perles blanches et accompagnée d’un châle aussi blanc que la neige que la demoiselle aurait été ravie. Mais non. Ça part dans tous les sens. Le résultat n’est pas moche en soit, c’est même jolie, mais personne ne peut avoir envie de porter ça. Mais la vérité, la vérité c’est qu’Ambre aurait aimé pouvoir dessiner aussi bien que son amie. Elle n’arrivait même pas à dessiner quelque chose qui ne ressemble pas au dessin d’une gamine de six ans.

Elle avisa alors une dernière fois du dessin et sourit doucement en caressant la feuille du bout des doigts. Les couleurs étaient belle et la coupe agréable. Et comme dire à sa meilleure amie qu’elle ne porterait jamais ce genre de chose quand elle vous regard comme ça ?

« Elle est belle oui »

Sourire sincère. Après tout elle le pense un peu quand même. Elle s’agace elle-même. Pourquoi n’est-elle pas née avec cette faculté de pouvoir apprécier ce genre de chose ? Non, au lieu de ça on lui a infligé une bombe à retardement qui fait qu’elle n’ose même plus s’endormir. Son regard se porte de nouveau sur son amie qui semble se régaler. Un sourire malicieux apparait au coin de ses lèvres et elle fait glisser sa chaise jusqu’à elle, venant murmurer à son oreille.

« J’aimerais pas être à la place de Mr. Sexy Boy. Parce que si tu le dévore avec autant d’ardeur que ces muffins, il n’en restera plus rien à la fin » rit elle avant de finalement reculer.

Logan. Un sourire amusé naquit sur les lèvres de la blonde, quelque peu parsemées de paillettes de sucre. Oui, elle savait qui était ce jeune homme. Elle savait où il bossait, etc. Sans l'avoir vu plus d'une fois ou deux. Pourtant, sur ce qui concernait ses affaires de coeur, Ambre n'était pas si bavarde que ça. D'un côté, la blonde trouvait cela un peu blessant d'une part, un peu dommage de l'autre. Parce qu'elle, elle lui disait tout. Absolument tout. Enfin bon. Elle connaissait son penchant pour lui. Et elle savait aussi qu'il ne risquait de rien avoir entre eux. Dommage. Mais Savannah était bien trop mal placée et pas douée pour se permettre de faire un commentaire sur sa vie. C'était ainsi.

Enfin bon. A présent, le dessin était entre les mains de la demoiselle. La blonde n'avait pas vraiment fait attention à la feuille qu'elle lui avait tendue, persuadée qu'il s'agissait de la bonne. Comme souvent, elle plutôt distraite. Une chose qui faisait surement son charme. Ou peut-être pas. Enfin, dans tous les cas, la jeune femme attendait le verdict de la demoiselle en face d'elle, avec une certaine impatience. Parce que bon. Elle avait mis pas mal de temps à la dessiner, passant des heures à regarder un tas de modèles, pour trouver ce qui lui irait le mieux. Elle voulait vraiment lui faire un beau cadeau. Parce qu'Ambre, c'était plus qu'une amie pour elle. Elle l'adorait, et aurait bien du mal, parfois, sans elle.

Ce fut donc avec grand intérêt qu'elle décrivit le moindre de ses mouvements, la moindre de ses expressions, histoire de voir si oui ou non ça lui plaisait. Et pour tout dire, elle lisait une certaine perplexité sur son visage, quelque chose qui lui fit soudain penser que ça ne lui plaisait pas. Une petite moue s'afficha, avant qu'elle ne soupire quelque peu, ne la lâchant pas du regard pour autant. Et puis, la concernée, l'observée même, se décida à rendre son verdict. Elle était jolie, oui. Mais ne lui plaisait pas. Un autre soupir, avant que Khiarra ne tende le bras, pour récupérer la fameuse feuille, et longuement la regarder. Pour ensuite, soudainement. Éclater de rire. Ça, ce n'était pas vraiment le cadeau pour Ambre, non. Un croquis pour un personnage, rien de plus. Secouant la tête, la blonde se tourna et fouilla un peu, lui tendant une autre feuille de même format. « Désolée, c'était pas pour toi, ça. C'est celle-ci. »

Là. Une très belle robe de soirée rouge. Drapée, d'un rouge vif. Avec un beau décolleté et croisée dans le dos. Longue, vraiment magnifique. Et Savannah était persuadée qu'elle irait à Ambre. Certaine. C'est pourquoi son sourire se fit un peu plus grand, avant qu'elle ne vire au rouge tomate -bien caché ou en partie par sa peau bronzée- en entendant sa remarque. Et faillit même s'étouffer avec son muffin. « MAIS t'es malade ma pauvre ?! Et s'il t'avait entendue ?! » Elle secoua ensuite la tête et s'accroupit sur sa chaise, le dossier face à elle, et soupira encore, fermant les yeux, ronchonnant à voix basse.

Sérieusement. Avec un homme, dans un lit, elle était totalement... Différente. Un peu timide et réservée. Pas aussi extravagante. Mais au moins, douce et affectueuse, du moment qu'elle était mise en confiance. Alors sincèrement, si elle se retrouvait dans le lit de son patron... L'idée fut bien vite chassée, alors qu'elle soupira, reprenant, l'air boudeur : « N'importe quoi, Ambre. Franchement, tu me connais. Tu sais comment je suis avec les hommes. Je suis nulle. » Argh. Elle ne voulait pas penser à cela. Vraiment pas. C'est pourquoi elle enchaîna sur quelque chose n'ayant aucun rapport. « Et le boulot ? Ça va ? Des choses intéressantes à me raconter ? »

Elle n’était pas du genre à parler de sa vie sentimentale, à personne. Pas qu’elle n’ait pas envie d’en parler à Sav mais elle avait toujours été réservée vis-à-vis de ses sentiments. Elle avait envie d’en parler, mais ça ne venait pas. Tout comme elle n’avait jamais vraiment parlé de sexe avec elle. C’était un sujet qui la bloquait quand ça devenait sérieux. Comme si l’ambre grise était quelque part et qu’elle bloquait littéralement cette partie de son cerveau. Elle n’y arrivait pas. Déconner, oui, taquiner, oui. Sérieusement, non. Le pire ? Elle avait envie d’en parler avec elle. Elle aurait voulu lui faire partager ce type de sentiments… Pourtant rien, ça ne marchait pas. Elle pensait à tout ce qu’elles avaient vécu ensemble, à tout ce qu’elles vivraient encore et un sourire mutin apparu sur ses lèvres. Non, elle n’était pas prête de la laisser s’échapper.

Elle ricana lorsque sa blondie d’amie s’étouffa à moitié avec son muffin. C’était tellement amusant de la faire tourner chèvre… elle était si amusante. Surtout qu’en plus elle s’était trompée dans ses dessins…

« Si tu étais un peu plus organisée ça ne serait pas… arrivé… »

Elle avait posé les yeux sur la feuille et en avait la bouche bée. Rouge. Longue. Décolletée. Croisée dans le dos. Elle était magnifique, divinement belle. Ambre cligna des yeux plusieurs fois avant de se reprendre. Ca y est, elle était de nouveau jalouse… Elle soupira lourdement et déposa la feuille sur la table.

« Rien. Mon patron m’a fichu un étudiant dans les pattes, ça m’gave sévère. Même pas fichu de faire un tableau Excel correctement. Comment je le supporte ? J’en peux plus ! »

Elle grogna et croqua dans un nouveau cookie, une moue boudeuse sur le visage. Rapidement, ses méninges marchèrent et un sourire empreint de sadisme s’afficha au coin de ses lèvres.

« JE SAIS ! » s’exclama-t-elle soudain « Je vais tellement le pourrir et être exécrable avec lui qu’il partira de lui-même ! Je suis la meilleure ! »

Et pour la peine elle reprit un cookie. Et puis elle cligna des yeux avant de retourner son regard sur Savannah.

« Excuse-moi… J’ai, comme qui dirais, oublier de te dire que ta robe est superbe ! Je continue à dire que tu ferais mieux de devenir styliste plutôt que de rester en boîte avec ce type de geek coincés et boutonneux. Mis à part Mr. Sexy boy. D’ailleurs quand est ce que je le vois ? J’ai envie de voir sa tête moi, à force d’en entendre parler. »

En y réfléchissant bien, Ambre et Savannah parlaient de tout et de rien, partageait énormément de choses. Après tout, cela faisait déjà plusieurs années qu'elles étaient amies, des meilleures amies, même. Tellement de choses partagées. Pourtant, il y avait certains sujets qu'elles ne faisaient qu'effleurer. Des sujets sérieux, comme les sentiments, pas exemple. Pourtant, la blonde n'avait aucun mal à lui confier que tel ou tel homme lui plaisait, etc. Après, au niveau de ses relations, elle lui avait parlé de son ex, le père de Steve. La brune savait ce que ce type lui avait fait. Tout ce qu'il avait pu lui faire. Elle avait eut du mal, mais l'avait fait. Parce qu'elle savait que son amie était la seule capable de la réconforter. Et pour, elle, elle ne lui parlait pas de tout ça, et parfois, elle se demandait si c'était pas gêne ou parce qu'elle ne lui faisait pas assez confiance. Mais la seconde option lui semblait impossible, ou difficilement imaginable. Parce qu'elle lui avait parlé de ce problème plus grave. L'ambre grise. Alors, elle laissa faire, ne sachant pas trop comment lui dire ça sans la blesser ou autre.

C'était certain. Pour elle cela dit, elle était organisée, son bordel avait un certain ordre, elle s'y retrouvait toujours. Le souci était plutôt qu'elle était trop distraite et pressée de lui présenter son dessin. Alors, cette fois elle l'observait avec grand intérêt, guettant se réaction. Pour le coup, elle semblait totalement ébahie, mais pourtant, ne dit rien. Non. Elle posa simplement la feuille sur le bureau, enchaînant sur le boulot et l'étudiant qu'elle devait supporter. Étrangement, quoi qu'elle avait bien vu son émerveillement, Khiarra était quelque peu déçue. Pourtant, elle ne dit rien, l'écoutant, un vague sourire aux lèvres, mangeant un peu plus lentement. Elle avait un peu de tenue, tout de même. Et, lorsqu'elle lui fit par de son idée pour le virer, un soupir la quitta, avant qu’elle de lui lance, gentiment moqueuse : « Ca pour être horrible et insupportable, t'auras pas trop à te forcer, ma belle. » Avec elle, son amie était toujours adorable, mais la blondinette savait à quel point elle pouvait être exaspérante parfois.

Et enfin, un compliment. Un peu court, mais elle s'en contentait. Elle savait donc qu'elle lui plaisait, et dès qu'elle aurait le temps, elle la réaliserait. Pour elle, pour lui faire plaisir. De toute façon, ce genre de robe, ça ne lui allait pas, à la demoiselle. Elle ne se trouvait pas assez féminine pour porter un vêtement aussi élégant. Qu'importe.

Puis, Ambre arriva sur le sujet de ses collègues. Voilà une chose qu'elle lui reprochait parfois. Elle n'avait pas l'esprit assez ouvert. Elle restait bien cloîtrée dans les idées pré-construites à propos des geek et autre. Cela désespérait quelque peu la blonde, qui une fois de plus, haussa un sourcil en soupirant. Ici, on ne trouvait pas vraiment de type boutonneux, comme elle disait. La plupart des types travaillant ici étaient adultes, et avaient plus ou moins de l'allure, selon s'ils s'entretenaient ou non. Mais pas l'ombre d'un ado boutonneux.

Passant une main dans sa frange, la jeune femme bailla légèrement, et répondit alors, la regardant en coin : « Hors de question que je me retrouve à travailler avec des pimbêches à la cervelle grillée par leur sèche-cheveux, tu vois. Tu sais que c'est pas mon monde. Et tu pourrais avoir un poil plus de respect pour les types qui bossent ici... » Vague ton de reproche, avant qu'elle ne retrouve le sourire et s'exclame : « Il devrait sortir d'ici quelques minutes. » Et en effet, il en sortit environ 5 minutes plus tard, passant devant son bureau, adressant un vague signe de main à Savannah, toujours aussi bien habillé, chemise ouverte en haut et pantalon droit nickel, qui se retint de dire ou faire quoi que ce soit, si ce n'est sourire. Lorsque le patron eut rejoint son bureau, elle expira longuement et glissa à son amie, le rouge aux joues : « Il va finir par me faire faire une crise cardiaque. » Avec un sourire pareil, il y avait des chances.